LUNAR TOMBFIELDS : Spiritual black dimensions

D’après la biographie fournie par le label, l’album The Eternal Harvest se veut être : « une ode à la gloire des étoiles, à la force des éléments et à la tragédie du destin humain ». Une fois n’est pas coutume, nulle tromperie sur la marchandise. Nous avons alors répondu sans attendre à la sombre invitation de Lunar Tombfields, nouvelle signature française des Acteurs de l’Ombre… [Entretien intégral avec M. (guitares/basse/chant, compositions et textes) par Seigneur Fred – Photos : DR]

LUNAR TOMBFIELDS logo

Faisons connaissance pour commencer : comment est né le projet musical Lunar Tombfields précisément en 2020 ? Le projet a-t’il germé du fait du contexte sanitaire et culturel mais aussi d’isolement social que nous avons tous connu à cette période ? Si oui, en quoi cela a-t’il pu vous influencer et aussi vous inspirer ?
Même si certaines idées gravitaient déjà dans ma tête, la véritable naissance de Lunar Tombfields en tant que projet à part entière est liée à la période du premier confinement. Tout d’abord car cela coïncide avec plusieurs moments de ma vie personnelle : j’avais besoin de mettre à plat certaines choses et j’ai choisi la musique pour le faire. Enfin car cela m’a donné le temps de composer ces quatre titres, enfermé dans ma propre bulle de création. Puis, une fois Azh m’ayant rejoint, cela m’a donné la possibilité de réfléchir posément aux différents arrangements. Il n’y avait pas de concerts en prévision et nous avons pu mettre à profit l’intégralité de ce temps au service de cet album.

Lunar Tombfields n’est constitué que deux membres : M. et Äzh. Ce ne doit pas être facile à deux de penser à tout, et il faut être en phase, sur la même longueur d’ondes et se compléter, comme un couple ! (rires) Quels sont les forces et faiblesses de votre duo musical, selon toi ?
Au contraire, tout est plus simple. Nous avons tous les deux d’autres projets, dont certains en commun. Et il s’avère que Lunar Tombfields est la formation où nous avançons le plus rapidement. Nous savons où nous voulons aller, et par définition prendre une décision à deux est toujours plus simple qu’à quatre. A mon sens, notre musique forme un tout cohérent car seulement deux cerveaux sont responsables de l’ensemble du projet, de la genèse d’un titre jusqu’à l’enregistrement de l’ensemble en studio. Et cela représente un véritable atout.

Pourquoi ce choix justement du nom de Lunar Tomfields pour votre projet, et vous considérez-vous comme un groupe uniquement de studio avec la volonté de rester ainsi (comme Darkthrone par exemple), ou bien avez-vous déjà effectué des concerts et jouer live ?
Lunar Tombfields renvoie à la fois à la dimension nostalgique et historique des thématiques traitées et à l’enveloppe éthérée, quasi astrale, que nous souhaitons donner à notre son. Le groupe a fait son premier concert lors d’une soirée organisée par Les Acteurs de l’Ombre à Nantes en novembre 2021, aux côtés de groupes comme Les Chants de Nihil (notre interview à lire ici) et Corpus Diavoli (interview à lire ici).

Assurez-vous vous-mêmes tous les instruments sur ce premier album The Eternal Harvest, y compris la batterie ? Comment avez-vous procédé en studio lors de l’enregistrement ? Êtes-vous ce que l’on appelle des multi-instrumentistes autodidactes et complémentaires, y compris au niveau du chant ?
Hormis en ce qui concerne le chant féminin sur le premier titre, l’intégralité de la musique a été composée et est interprétée par Äzh (batterie, guitare) et moi-même (chant, guitare, basse). L’idée d’écrire quelque chose que nous n’aurions pas pu jouer nous-mêmes n’aurait pas eu de sens. Pour cela, nous sommes complémentaires sur la répartition des rôles sur ce disque. Pour ce qui est de l’apprentissage, j’ai tout appris en autodidacte alors qu’Äzh vient d’une famille de musiciens et est passé par une école de batterie.

En parlant de studio, vous avez enregistré The Eternal Harvest au Darkened Studio du côté de Nantes (44) avec un certain Nerik, à ne pas confondre avec le « Endarker Studio », studio suédois chez l’ancien bassiste de Marduk, Magnus Devo Andersson. Il me semble que le Darkened studio est le lieu où les gars de Regarde Les Hommes Tomber avaient enregistré leur premier album éponyme, mais aussi plus récemment, c’est là où le batteur Äaerzerath (Natremia, Defenestration) a déjà enregistré avec G. pour le projet Adoperta Tenebris récemment interviewé à Metal Obs). Pouvez-vous confirmer cela et me dire comment travaille Nerik ? D’ailleurs peut-être avez-vous croisé l’artiste G. d’Adoperta Tenebris (chronique à retrouver ici) à cette même période d’enregistrement… ?
C’est bien Nerik qui s’est occupé de l’enregistrement du dernier album d’Adoperta Tenebris. Nous n’avons pas croisé G., mais Äzh a effectivement enchaîné les prises de ces deux disques à quelques jours d’intervalle : Adoperta Tenebris puis Lunar Tombfields, puisqu’il s’agit du même batteur. Quant à Nerik, c’est une connaissance de longue date car il s’est déjà occupé d’enregistrer certaines sorties de nos autres groupes (Defenestration, Absolvtion, Natremia) ou de sonoriser certaines de nos prestations live. Il a rapidement identifié vers quelle direction nous voulions aller sur The Eternal Harvest. L’enregistrement s’est très bien passé. Nous avons eu quelques discussions ensemble afin de peaufiner le son et modifier quelques arrangements. Nous sommes heureux du résultat qui rend hommage aux ambiances créées sur ce disque.

The Eternal Harvest commence par une intro sur « The Ancestral Conjuration » avec un chant clair féminin avant que les hostilités n’arrivent, à savoir un black metal relativement venimeux mais assez atmosphérique finalement. Qui est cette chanteuse que l’on n’entend plus ensuite ?
Le chant féminin présent sur « The Ancestral Conjuration » est interprété par Dolorès, une connaissance de longue date. J’ignore pourquoi, mais j’ai su dès le début du projet que l’introduction de l’album serait portée par un chant féminin.

Pourquoi ne l’entend-on pas davantage justement ? Sur un morceau comme « As the Spirit Wanes , The Form Appears », avant ou après le solo de guitare, ou après le break central par exemple, ce type de chant féminin aurait été intéressant en parallèle des screams black metal ? (sourires)
Nous aimons la dualité que cela apporte à l’ensemble, mais nous souhaitions que le chant féminin reste exceptionnel et non pas en faire un élément constitutif de notre univers sur tout l’album.

En commençant ainsi ce premier album, par une intro donc au chant clair féminin, souhaitez-vous brouiller les cartes auprès de l’auditeur et le conduire ensuite là où il ne s’y attend pas en fin de compte ? (rires)
Non, du tout. Il ne s’agit pas de brouiller les pistes, mais plutôt d’introduire de manière posée et nostalgique les différentes thématiques qui vont être développées tout au long de l’album.

Ce premier album ne contient que quatre longs morceaux, d’une durée comprise entre 9 et 14 mn. Ne craignez-vous pas que le format plutôt proche d’un mini-album et que la longueur des morceaux ne laissent l’auditeur un peu sur sa faim en en demandant encore à la fin de son écoute ?
Je ne pense pas car The Eternal Harvest s’étend tout de même sur quarante-cinq minutes, ce qui représente une durée importante pour un album. Nous avons conçu ces quatre morceaux comme de longues pièces qui racontent des histoires. Et ces histoires sont mouvementées, tout comme le sont les destinés humaines. Par conséquent une véritable progressivité devait se fait ressentir au sein de notre musique.

Quel est le concept ou l’idée sur The Eternal Harvest. S’agit-il d’un voyage mortuaire, vers la mort, à l’image de la pochette qui semble représenter un char avec son conducteur qui fait la récolte des âmes en nous conduisant inévitablement vers les ténèbres… ?
The Eternal Harvest est une élégie à la quête sans fin de l’Homme pour comprendre le sens de son Histoire et son incapacité à panser les blessures de son passé. Nous avons essayé de donner vie ici à une musique qui véhicule la nostalgie et la contemplation. De tout temps, l’Homme a cherché à justifier le sens de ses actions par l’intervention de divinités, qu’elles soient astrales, mythologiques ou monothéistes. Cet album est une conversation, à la fois spirituelle et écorchée, entre les différents fantômes de nos légendes.

Musicalement, de quelle école vous revendiquez-vous plutôt, et quelles sont vos principales influences en matière de black metal et autres genres ? Forcément, on pense au black metal scandinave, du fait de certaines mélodies en tremolo plus typiques, mais aussi autrichien, comme les premiers Abigor ou Summoning (sans les claviers), ou français peut-être… ?
Nous écoutons tous les deux beaucoup de styles très différents, que ce soit au sein de la sphère metal ou en dehors. Pour ce qui est des influences principales de Lunar Tombfields, elles sont à chercher plutôt du côté de la scène black metal américaine (Wolves in the Throne Room, Weakling, Krallice) ou bien plus généralement européenne (Drudkh, Blut Aus Nord).

Que pensez-vous de la scène black metal française de nos jours qui évolue beaucoup, notamment par le soutien promotionnel de votre label Les Acteurs de l’Ombre Productions ?
Nous n’avons pas d’avis spécifique sur la scène black metal française, qui comprend de très bonnes choses et des moins bonnes comme la plupart des autres scènes. Nous sommes d’ailleurs proches de certains groupes qui officient également dans cette sphère. Il est vrai que le rôle des Acteurs de l’Ombre n’est pas étranger au développement de la scène, et nous sommes satisfaits de notre collaboration avec eux.

Enfin, quels sont les projets de Lunar Tombfields pour cette année 2022 qui commence sous de meilleurs auspices, on l’espère tous, notamment dans la culture et la musique ? Des projets de concerts sont-ils prévus en France et à l’étranger ? Des festivals d’été peut-être de programmés ? Des dates communes avec d’autres artistes du catalogue LADLO ?
Nous avons monté un line-up live et sommes d’ores et déjà en train de travailler sur une future tournée. Nous avons prévu de jouer en live un maximum, donc n’hésitez pas à nous contacter sur les réseaux sociaux. Le contexte sanitaire demeure incertain, mais notre volonté de donner vie aux titres de The Eternal Harvest sur scène est bien réelle.

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